par Susan Wagg

Table des Matières

Remerciements

Avant-propos

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Notes biographiques

Abréviations et Notes

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6 UN HOMME AUX MILLE ET UN TALENTS

"La pratique de l'architecture comporte mille et une facettes", écrivait Nobbs, "et le succès dans cette profession des plus exigeantes repose nécessairement sur ce que l'on peut appeler un amalgame de talents."1 Son amalgame personnel était aussi varié qu'étendu. À des talents en peinture et en arts décoratifs, il alliait une adresse exceptionnelle dans diverses activités sportives, en particulier l'escrime et la pêche au saumon. Un de ses anciens élèves, l'architecte et urbaniste montréalais Harry Mayerovitch, se souviendra toujours du précepte que Nobbs lui avait inculqué et qui guida son professeur tout au long d'une vie longue et exceptionnellement active: l'architecture constitue une seule facette de la vie.2 Nobbs croyait fermement que la spécialisation était l'une des tares des temps modernes.

L'enthousiasme et la compétence dont il a fait preuve dans les divers arts et métiers liés à l'architecture constituaient le prolongement des efforts des réformistes pour créer un monde où il ferait bon vivre, où l'on briserait le joug de la machine pour goûter à nouveau les joies de la créativité. Pour ces réformistes victoriens - Pugin, Ruskin, Morris - les progrès débridés de la technologie étaient une menace au bien-être moral et physique de l'Homme, mais l'intérêt de Morris pour les anciens métiers d'artisanat n'était pas purement une forme d'évasion culturelle, mais un effort réel pour améliorer la qualité du design contemporain et donc l'environnement quotidien par une compréhension profonde des matériaux et des méthodes de travail. Morris réussit à amener un nouveau raffinement aux arts décoratifs, bien qu'à grands frais; et bon nombre de ses idéaux ont fait leur chemin dans l'âge de la machine qu'il craignait tant. Nobbs, contrairement à des prédécesseurs comme Ruskin et Morris, n'avait pas la civilisation moderne en horreur; mais il était plus âgé que les pionniers Gropius et Le Corbusier, et de par sa formation, il privilégiait les anciennes méthodes et les anciens matériaux. Il s'intéressait à de nombreux arts décoratifs, dont le plâtre et le fer forgé décoratifs, le vitrail (pl. IV), la sculpture architecturale et l'ébénisterie. Il pouvait également tailler un habit et il a même dessiné les robes des filles d'honneur à son mariage - des robes charmantes à taille haute avec charlottes à la Kate Greenaway.

Pendant la plus grande partie de sa carrière, on pouvait encore se permettre d'utiliser les méthodes artisanales traditionnelles; et Nobbs chercha constamment à adapter l'ancien au nouveau, croyant que dans ce domaine, comme en architecture et en urbanisme, une grande leçon pouvait être tirée du passé. Ses idées sur le plâtre décoratif l'illustrent bien.

De nombreux architectes des Arts et Métiers affectionnaient le plâtre décoratif; un commentaire de Ernest Prior cité par Nobbs en explique clairement les raisons: "De tous les matériaux qui donnent une surface architecturale, le plâtre est le plus malléable. À peine conçue, la moindre fantaisie de l'artisan s'y imprime directement. Point n'est besoin de le ciseler comme la pierre ou le bois, ou d'y empreindre des idées au marteau comme pour le fer: le toucher d'un doigt lui donne vie!"3 Lorimer créa de nombreuses et splendides décorations de plafond en plâtre au cours de sa carrière; certaines sont très détaillées et témoignent d'une adresse remarquable. Au Canada, la main-d'œuvre qualifiée était rare et coûtait de plus en plus cher, mais les moules industriels pour le plâtre étaient déjà sur le marché. Au sujet de ces derniers, Nobbs fit remarquer qu'il valait mieux "ne pas avoir dans notre salon l'ornement stéréotypé que nous pouvons trouver dans la boutique du coin et dans la maison où nous avons dîné hier soir." En outre, nombre des détails produits à l'aide de ces moules étaient plutôt mornes et monotones. Ayant suivi l'exemple de Lorimer et, alors qu'il était étudiant, étudié attentivement et dessiné les anciens plâtres d'Angleterre et d'Ecosse, Nobbs était en mesure de proposer une méthode qui, selon lui, serait non seulement bien adaptée au climat canadien, mais allait améliorer la qualité des plâtres canadiens en général. Il prônait la réutilisation d'une méthode en vigueur pendant la dernière moitié du XVIe siècle en Grande-Bretagne qui combinait le moulage et le modelage à la main. Les éléments simples comme les tiges, les guirlandes et les rubans étaient faits à la main sur place, car ils étaient faciles à modeler et pouvaient s'enseigner rapidement à un ouvrier intelligent. Les feuilles, les fruits, les fleurs et les emblèmes héraldiques - les éléments les plus complexes - pouvaient être modelés à l'avance dans des moules d'argile en quantité nécessaire et liés au reste. La méthode était pratique et économique (pour l'époque); et elle faisait en outre appel à la créativité du plâtrier. La souplesse constituait un autre atout important. Nobbs nota que "l'on peut obtenir le degré de classicisme ou de naturalisme désiré dans le raffinement ou la sobriété voulus. Les décorations sont conçues 'sur place', atout aussi important que leur mode de fabrication."

Personnellement, Nobbs préférait une sobriété sereine, et il écrivait que "rien dans un plafond ne devrait s'affirmer aux dépens des objets qui ornent les murs ou du mobilier, mais il ne faut pas sous ce prétexte qu'il soit totalement terne ou sans vigueur." Comme le plâtre est un matériau opaque et tire une partie de sa beauté d'un jeu d'ombre et de lumière, Nobbs condamnait l'utilisation de la couleur, préférant un blanc jaune. "Peindre une corniche chocolat et rehausser les détails en or revient à enlever au plâtre sa raison d'être et à saboter la beauté de la texture dont il est naturellement si bien doté - Où sont passés les jeux d'ombre et de lumière?" Il mettait ici simplement en pratique la règle de Morris sur la compréhension et le maniement du matériau en fonction, et non à l'encontre de ses propriétés naturelles.

Nobbs se servit des plâtres pour donner caractère et dignité à des pièces particulières comme le salon des étudiants et le grand hall du centre social, le bureau du président et la salle du Conseil de faculté du Macdonald Engineering Building, et la salle du Conseil de faculté (qu'on appelle Senate Chamber) (fig. 24) du pavillon des Arts à l'université de l'Alberta. Cette dernière possède les plus beaux - les plus somptueux plâtres décoratifs conçus par Nobbs. De forme ovale comme la salle à manger de la maison Todd, conçue antérieurement, c'est une pièce haute et spacieuse décorée au plafond d'une grande guirlande circulaire. Les murs sont ornés de niches peu profondes contenant des paniers de fleurs grandeur nature - et chaque panier diffère subtilement de l'autre. Le pavillon des Arts fut terminé alors que Nobbs était en train d'organiser les cours d'éducation physique et de charge à la baïonnette pour les soldats canadiens pendant la première guerre mondiale. En octobre 1915, de son camp de Valcartier, l'architecte écrivit toutefois à M. Tory pour lui demander de différer le choix du mobilier de la salle du Conseil de faculté et du bureau du président. "J'aimerais énormément dessiner les meubles de ces deux pièces, car ce ne sont pas là des endroits ordinaires."4 Heureusement, M. Tory accepta d'attendre, et la salle du Conseil de faculté est certainement l'un des plus beaux intérieurs de cette période au Canada.

Nobbs ne réservait pas le plâtre ornemental à ses seuls projets domestiques et universitaires. Le hall d'entrée du New Birks Building (fig. 26), qu'il dessina en 1911 pour cette firme de bijoutiers en pleine croissance, possédait des plâtres décoratifs particulièrement attrayants. Nobbs fit également appel aux arts décoratifs pour mettre en valeur des édifices à bureaux modernes, car il voulait infuser esthétique et personnalité à un type de bâtiment qu'il jugeait plus vulnérable à la standardisation. Dans un autre projet conçu pour Birks un peu plus tard, la rénovation d'un ancien YMCA situé avenue Portage à Winnipeg, il a élaboré une frise formée d'éclatantes incrustations de terre cuite et plus bas, six médaillons en terre cuite. Les médaillons illustrent l'origine des métaux précieux et semiprécieux utilisés en joaillerie et la frise, œuvre conjointe de Nobbs et Ramsay Traquair, dépeint la visite de la reine de Saba au roi Salomon, circonstance qui justifia le cadeau d'un collier de perles.

La terre cuite vint aussi égayer la façade principale du Drummond Médical Building (fig. 27) situé rue Drummond à Montréal, un bâtiment de brique qui, neuf, était de teinte chamois. Conçu en 1929, ce bâtiment représentait pour Birks un projet d'investissement, car on y avait prévu des boutiques au niveau de la rue et des bureaux de médecins aux étages supérieurs. Nobbs conçut donc des allèges de fenêtres en terre cuite bleue et vieil or qui intégraient le symbole de la croix médicale. En 1929, des tendances semi-modernes, dont le Art Déco, avaient fait leur apparition à Montréal, et bien que le Drummond Médical Building laisse transpirer les nouvelles tendances et marque un progrès sur l'ordonnancement traditionnel base - fût - chapiteau du New Birks Building, Nobbs ne trouvait pas l'ornement abstrait assez expressif pour ses desseins. Même ainsi, la façade nord, avec ses fenêtres à meneau central élancé, illustre élégamment une composition rationalisée.

Le Drummond Médical Building conserve encore sa belle marquise en fer surplombant l'entrée principale - la ferronnerie étant l'un des ornements préférés de Nobbs. Même s'il ne fut pas le précurseur de la renaissance du métal ouvré qu'a connu le Canada vers le tournant du siècle, sa participation en tant que designer de premier plan et professeur fut très importante; et il souligna l'importance du mouvement des Arts et Métiers en général en encourageant cette renaissance. Lors de sa première conférence à la faculté d'Architecture de McGill, il illustra grâce à la ferronnerie le point de vue des Arts et Métiers sur l'importance du matériau et des procédés techniques dans la création d'un bon design. "Une lourdeur grossière convient bien à la fonte et fait toute sa beauté", soulignait-il, "tandis qu'une finesse s'apparentant à la dentelle caractérise le matériau et la technique du fer forgé."5 Il nota ailleurs que sa propre démarche s'écartait légèrement de la méthode traditionnelle qui consistait à dessiner et à exécuter son propre ouvrage. "On peut affirmer que l'architecte, qui devrait plus ou moins maîtriser tous les métiers, doit exercer un contrôle rigoureux, si on veut l'appeler ainsi, sur le travail des métaux ou autre artisanat qui pourrait se retrouver dans ses œuvres."6 Parce qu'il affectionnait le fer forgé, Nobbs l'incorpora à toutes ses œuvres en commençant par sa première, le centre social de McGill. L'intérieur y était paré d'élégantes rampes d'escalier en fer forgé, malheureusement perdues lorsque le bâtiment fut rénové pour recevoir le Musée McCord.

À l'instar de Morris, Nobbs préférait les formes stylisées, bien qu'encore naturalistes, et des plantes et fleurs de différentes espèces formaient la majeure partie des motifs de l'architecte. On peut voir l'un de ses designs les plus saisissants, deux grilles en fer forgé (fig. 29), à l'entrée d'une propriété située sur l'avenue Sunnyside à Westmount. Des faîteaux en forme de tulipes couronnent des balustres qui montrent chaque étape du cycle de croissance, du bourgeon à maturité.

Nobbs employa pour exécuter ses dessins les meilleurs artisans de son temps, et ses deux collaborateurs favoris étaient Herman Sontheim, originaire de Bavière, et Jack Hedges, un Anglais établi à Montréal. Nobbs nota que les deux hommes, à l'instar de Paul Beau, ferronnier et designer renommé, employaient une soudure autogène moderne avec les anciennes techniques utilisées pour souder, tourner et lier le fer forgé. Sontheim a exécuté pour Nobbs plusieurs ouvrages dont, à notre connaissance, l'entrée de l'avenue Sunnyside au début des années 20; le jubé et les ferrures de la St. James Church à Trois-Rivières (Québec), qu'on avait chargé Nobbs et Hyde de rénover en 1916 et qu'ils terminèrent dans les années 20; la ferronnerie décorative de la Liverpool and London and Globe Company (1914-15), située à l'époque à l'angle de la rue Dorchester et de l'avenue Union. Jack Hedges exécuta divers ouvrages de ferronnerie, dont la tribune de l'orgue et la porte de la chapelle de la Erskine and American United Church rue Sherbrooke à Montréal, où Nobbs et Hyde effectuèrent une rénovation importante de l'intérieur en 1938.7

Enfin, l'aquarelle était pour Nobbs un important exutoire créateur. L'architecte était un dessinateur accompli et il exécutait les avant-projets de sa firme, dont les belles perspectives à l'aquarelle des contrats importants, et souvent également les épures en couleur. Lorsqu'il était un jeune architecte à Londres, le Builder fit l'éloge de la qualité des dessins qu'il avait soumis aux concours annuels de la R.I.B.A., surtout des dessins en couleur.8 Certains de ses premiers dessins furent reproduits dans le Architectural Association Sketchbook et le British Architect entre 1901 et 1904.9

Nobbs fit de la peinture toute sa vie - les illuminations du Kremlin à Moscou, en l'honneur du couronnement de l'empereur Nicolas et de l'impératrice Alexandra (auquel assista Nobbs en tant qu'artiste de presse, ce qui lui valut la Croix de Saint-André), la rivière Matane où il péchait le saumon, le jardin de sa maison de Belvedere Road (pl. II), et le jardin de sa femme à la belle maison d'été des Shepherd à Como au Québec. Pendant la première guerre mondiale, alors qu'il servait en France, Nobbs a peint des scènes rurales. Il est intéressant de noter qu'il n'a peint aucune scène de dévastation; on y voit plutôt des bâtiments et des paysages intacts et ces scènes furent peut-être pour l'architecte un moyen d'évasion et de libération. En dépit de son amour de la peinture, Nobbs n'en fit pas moins remarquer un jour qu'il n'était pas tant fasciné par la peinture elle-même que par le réalisme d'une nature pour lui primordiale dont le portrait lui tenait à cœur. L'auteur anonyme de la notice nécrologique de Nobbs parue dans le Journal of the Royal Architectural Institute of Canada disait:

(...) bien peu d'hommes ont eu une perception aussi remarquable du monde qui les entoure ou une telle aptitudeà en garder mémoire. Percy Nobbs pouvait dessiner demémoire, d'une manière vivante et précise, et si quelqu'un s'étonnait de ce talent mystérieux, il faisait généralement remarquer qu'on ne pouvait vraiment prétendre avoir vu quelque chose si on ne pouvait le dessiner. Voir et comprendre étaient pour lui une seule et même chose. Ses yeux et son cerveau étaient comme un appareil-photo à la mise au point rigoureuse doté d'un film très sensible.Tous ceux qui l'ont connu se rappellent le coup d'œil un peu grimaçant avec lequel il observait les choses qui l'intéressaient. Il pouvait percevoir des couleurs au delà du spectre visuel et apprécier une distance avec la précision d'un bon télémètre.10

Si la réalité inspirait la peinture de Nobbs, elle figurait également en bonne place dans ses activités sportives favorites: la pêche au saumon, la chasse à l'orignal et l'escrime - peut-être parce que l'architecture est un art qui doit constamment répondre aux exigences de la réalité. Dans les deux premiers sports, la proie et son environnement sont deux défis, et le dernier était à l'origine un combat meurtrier. Nobbs aimait particulièrement les sports de compétition, qui servaient sans aucun doute d'exutoire à son mauvais caractère, mais également parce qu'il croyait dans la loi du plus fort et aimait mettre à l'épreuve son intelligence et son adresse. Il apprit l'escrime à Florence en 1900 faute de pouvoir pratiquer la boxe; en 1908, après avoir remporté le premier championnat canadien d'escrime, il reçut la permission d'accompagner le contingent canadien aux jeux olympiques de Londres à ses propres frais; il était le seul escrimeur. Il reçut une médaille d'argent pour une démonstration internationale de fleuret; c'était l'une des premières médailles que gagnait le Canada depuis la reprise des jeux.

Nobbs aimait l'escrime pour la beauté et la précision des gestes, l'adresse exigée et l'intensité incroyable du jeu. "Sous tous ses aspects", écrivait-il, "comme simple exercice, détente, mécanique appliquée, gymnastique de l'esprit, leçon d'étiquette, exercice de coordination, contrôle de soi, ruse, stratégie et esprit sportif, cette science, cet art et ce sport est trop remarquable pour disparaître de notre civilisation, même si nous avons éliminé le duel."11 À quatre-vingts ans, Nobbs pratiquait encore l'escrime.

L'adresse de l'architecte à l'arme blanche touchait même la baïonnette, à laquelle s'était d'abord intéressé le petit garçon captivé par les exercices de charge à la baïonnette de la garnison de Saint-Pétersbourg. Il se rendit en Angleterre au déclenchement de la première guerre mondiale pour s'enrôler dans les fusilliers du Northumberland, mais raconta qu'un œil malade le fit renvoyer au Canada où il prit la direction des cours de charge à la baïonnette et de conditionnement physique au camp Valcartier (Québec), pour organiser plus tard des programmes d'entraînement similaires au Québec, en Ontario et en Nouvelle-Ecosse.12 Nobbs finit par se débrouiller pour être renvoyé en Europe comme expert en camouflage avec les Royal Engineers of the Impérial Forces en France. Il y conçut "deux des meilleurs camouflages du front [qui dissimulaient] les quartiers généraux des forces armées canadiennes dans un quasi 'No Man's Land' au plus fort du combat."13 Il a obtenu le grade de major pendant son service militaire.

La rapidité et la vigilance qu'exigeaient la charge à la baïonnette et l'escrime firent de Nobbs un fin pêcheur. "Il pouvait préparer une mouche et la lancer pour déjouer le plus prudent des saumons."14 L'architecte était évidemment fasciné par les chapeaux de femmes à cause des nouvelles idées qu'offraient leurs garnitures aux couleurs éclatantes pour les mouches à saumon. Dans sa jeunesse, le déraillement d'un train de cirque lui permit de récupérer la longue queue blanche d'un étalon mort, qui a fourni à Nobbs et à ses deux compagnons des crins pour les mouches de pêche jusqu'à la fin de leurs jours.15

Comme sur la plupart des sujets qui l'intéressaient profondément, Nobbs écrivit sur la pêche au saumon et l'escrime et finit par publier Salmon Tactics en 1934 et Fencing Tactics en 1936. Son livre Design, qui traitait de ses théories en architecture, fut également publié dans les années 30 (1937), décennie où les contrats se faisaient rares à cause de la Crise; de nombreux architectes avaient beaucoup de temps à consacrer à d'autres activités.

Salmon Tactics fut écrit dans un but très précis - susciter l'intérêt et donc favoriser la gestion et la protection de la pêche au saumon dans les provinces maritimes. Lorsque Nobbs commença à pêcher au Canada, les meilleures rivières à saumon étaient en train d'être détruites par les barrages hydroélectriques, la pollution et un braconnage inconsidéré. Avec la même énergie et la même minutie qu'il avait consacrées à l'urbanisme, Nobbs brossa un tableau des solutions qui permettraient d'assurer la survie de l'un des plus grands poissons et d'une ressource nationale. Il fonda finalement en 1948 la Atlantic Salmon Association, qui existe encore aujourd'hui, pour faire campagne en faveur d'échelles à poissons autour des barrages et de différentes mesures de protection. En 1952, à l'âge de soixante-dix-sept ans, il mérita le Outdoor Life Conservation Award pour avoir le plus contribué à la conservation de la faune pendant l'année.

Nobbs voyait l'environnement bâti et naturel comme Pugin, Ruskin et Morris avaient vu l'architecture et les arts connexes, c'est-à-dire un élément lié à l'homme et auquel l'homme était lié, et non un secteur complètement déconnecté de la société. Il avait voué son cœur à la terre et à ses habitants parce qu'il reconnaissait leur interdépendance.

 

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APOSTILLES

1. Nobbs, «University Education in Architecture», JRAIC 2 (mars-avr. 1925), p. 70.

2. Entrevue avec Harry Mayerovitch, Montréal, 6 sept. 1978. Mayerovitch est lui-même peintre, poète, et photographe.

3. Cette affirmation et la citation qui suit sur le plâtre sont de Nobbs, «Plaster Décoration - Modelled and Handwrought», CAB 17 (janv. 1904), pp. 4-6.

4. Lettre de Nobbs à Tory, 1er oct. 1915. Tory Papers.

5. Nobbs, «Opening Lecture of the Department of Architecture, McGill University", CAB 17 (oct. 1904), p. 155.

6. Nobbs, «Métal Crafts in Canada», Canadian Geographical Journal 28 (mai 1944), p. 213.

7. Ibid., pp. 215-17.

8. The Builder 85 (15 août 1903), p. 177.

9. The Architectural Association Sketch Book, 3e série, 5-8 (1901-04); The British Architect (20 mars 1903).

10. JRAIC 42 (janv. 1965), p. 13.

11. Nobbs, «Praise of Fencing», The McGill University Magazine 4 (mai 1905), p. 239.

12. Nobbs, «Antagonistics - Bayonet Training», (MS inédit appartenant à Francis J. Nobbs), p. 15.

13. AUM 4, p. 147 (Montréal Gazette, 20 janv. 1919).

14. JRAIC 42 (janv. 1965), p. 13.

15. Nobbs, «Tyne, Tweed and Clyde», (MS inédit appartenant à Francis J. Nobbs), p. 6.

 

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